Chaque semaine, en partenariat avec France Inter, la rédaction d’UP le mag vous propose un long format pour mieux comprendre une tendance sociale, sociétale ou environnementale. Pour écouter la version audio, accédez au podcast de la chronique radio « Social Lab ».
Que nous habitions en ville ou à la campagne, nous sommes tous le voisin de quelqu’un. Des gens souvent prêts à rendre service ou faire des échanges, mais à qui l’on ose à peine demander un coup de main. Et si un réseau social de voisinage nous aidait à briser la glace ? Une solution attractive à l’ère du numérique et de l’économie sociale et solidaire.
Les voisins sont des gens formidables, mais leur richesse – tant sur le plan humain que sur le plan économique – est encore trop insoupçonnée. En France, seulement 1 Français sur 5 est ami avec son voisin, selon un sondage spécial Fête des Voisins (mai 2016). Une distance qui n’illustre pourtant pas la réalité. Car d’après un sondage de l’Institut Viavoice/L’Express (mai 2010), 90% des sondés se disent enclins à effectuer une démarche pour le dépanner.
Qu’est-ce qui fait donc obstacle aux relations de voisinage ? En plus de la « peur de déranger », pour Atanase Périfan, à l’origine de la Fête des Voisins, la cause viendrait de « notre méfiance » à l’égard des individus : « Si je sonne à votre porte en me présentant comme votre nouveau voisin du 3e, vous allez hésiter avant d’ouvrir à un inconnu. Je caricature, mais c’est une réalité. La défiance est en train de miner la relation. »
La Fête des Voisins, un succès qui s’exporte
C’est suite au décès d’une personne âgée dans son immeuble dont le corps fut découvert quatre mois plus tard qu’Atanase Périfan décide de créer en 2000 la Fête des Voisins.
Alors qu’ils n’étaient que 500 000 la première année, les participants se comptent en dizaine de millions et ce, dans le monde entier.
Le succès est au rendez-vous. Alors qu’ils n’étaient que 500 000 la première année, les participants se comptent en dizaine de millions et ce, dans le monde entier (30 millions dont 8 millions en France, en 2015). La Fête des Voisins est devenue un incontournable du calendrier : 94 % des Français connaissent l’événement et 1 sur 3 y a déjà participé, selon un sondage Viavoice/Voisins Solidaires (mai 2014).
De quoi satisfaire pleinement Atanase Périfan ? Pas vraiment. « Je suis fier d’avoir porté ce projet. Cependant on pourrait presque pleurer du fait qu’il doit y avoir un jour dans l’année pour que les voisins se côtoient, regrette-t-il. On communique à l’autre bout de la planète par mail ou par réseaux sociaux avec des inconnus, mais pas avec celui qui habite à côté de chez nous. »
Recréer du lien social entre voisins grâce à Internet
Le Web abolit les distances avec les pays lointains, mais il peut aussi nous aider à briser la glace entre voisins, au quotidien. Selon David Rouxel, « l’atout majeur du numérique est de recréer du lien social grâce à l’interactivité immédiate ou à la géolocalisation. »
le site vous indique les réseaux de voisinage, constitués dans un périmètre de 500 mètres à 30km.
Comment ça marche ? Vous vous inscrivez et en fonction de votre adresse, le site vous indique les réseaux de voisinage, constitués dans un périmètre de 500 mètres à 30km. Ensuite, à vous d’indiquer vos besoins ou les services que vous souhaitez rendre. Que vous recherchiez à emprunter une tondeuse ou que vous souhaitiez proposer quelques heures de babysitting, tout est prétexte à se rendre utile, faire des économies ou gagner un peu d’argent, et surtout aller vers l’autre.
Aujourd’hui la startup bretonne est en pleine expansion. Avec une dizaine de salariés au compteur, Mon p’ti voisinage se rémunère notamment auprès des collectivités territoriales à qui elle propose des packages de services. « En plus de la bourse French Tech de Bpi France, nous venons de lever 1,7 millions d’euros auprès de l’assureur MAIF », se félicite David Rouxel dont l’ambition est de s’implanter en Europe, dès 2017.
Sur le même modèle, des applications de partage entre voisins n’ont pas tardé à émerger ces dernières années telles que Voisineo, ShareVoisins ou Yakasaider.
Rompre l’isolement ou s’improviser restaurateur
Enfin, d’autres sites comme Mon voisin cuisine vous permettent d’acheter des plats préparés par votre voisin. « Le modèle de rémunération est basé sur un pourcentage à la commande du client, équivalente à 10%. Notre volonté est ainsi de ne jamais taxer le cuisinier, qui est notre plus grande richesse », explique Anouck Talban, sa fondatrice. De quoi faire revivre toute une vie de quartier !
Petit voisinage deviendra grand
« En plus de succomber aux effets de mode, attention tout de même à ce que ces startups ne s’installent pas dans le règne du business, s’enquiert Atanase Périfan. Ce serait dommage que les utilisateurs s’inscrivent sur ces sites seulement dans une logique marchande, en se disant qu’il y a de l’argent à se faire. » Même si force est de constater que ces plateformes numériques sont un formidable accélérateur de lien social dans ce sens où « elles concentrent et partagent les bonnes pratiques », observe l’actuel secrétaire national à la mobilisation solidaire du parti Les Républicains.
Le site recense près de 150 000 utilisateurs et 50 000 objets et services partagés.
Sachant que le numéro 1 du covoiturage compte plus de 25 millions de membres et que 50% des Français se disent prêts à donner de l’argent sur une plateforme de crowdfunding, soit un potentiel de 33 millions de Français. On peut supposer que l’avenir – motivé par une multitude de prétextes – frappera bientôt à la porte du voisinage 2.0.
Retrouvez l’article « Nos voisins et nous ” dans la 10ème édition d’UP le mag
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